Penser la relation entre le marxisme et l’histoire de la Révolution française, marxisme au sens de la pensée de Marx d’une part, de l’utilisation du cadre conceptuel de la pensée de Marx par les historiens d’autre part, implique de rappeler une banalité et un paradoxe. L’historien de la Révolution française, qu’il soit marxiste ou non, ne peut se passer de Marx. Pourtant Marx n’a écrit aucun ouvrage sur l’histoire la Révolution française même s’il eut le projet d’écrire une histoire de la Convention. Par ailleurs, ses réflexions sur la Révolution de 1789 ne constituent pas un corpus comparable aux grandes synthèses historiques rédigées au cours du XIXe siècle par les historiens libéraux et romantiques tels Guizot, Tocqueville ou Michelet, dont l’apport est indispensable au chercheur spécialisé dans l’étude de la période révolutionnaire. Paradoxalement, l’historiographie de la Révolution française ne s’est pour autant pas développée sans lui. Au tournant du siècle, Jean Jaurès a le premier revendiqué l’influence directe de la pensée de Marx sur son approche de l’histoire révolutionnaire. Marquée par la prise en compte inédite de la dimension socio-économique des phénomènes historiques et singulièrement de l’épisode révolutionnaire français, son Histoire socialiste de la Révolution française (1) a ouvert la voie à un champ de recherche fructueux dont se sont réclamés les plus grands spécialistes de l’histoire de la Révolution, notamment Georges Lefebvre, Ernest Labrousse et Albert Soboul. Dans ce cadre, résultat de la rencontre entre une tradition érudite et inspirée par les préceptes de l’Ecole méthodique (« positiviste ») d’étude de la Révolution française et une conception totalisante de l’histoire issue de la pensée de Marx, s’est épanouie une historiographie marxiste ou marxisante de la Révolution intrinsèquement liée à cette configuration historique particulière. D’inspiration jaurésienne, donc socialiste et républicaine, l’historiographie marxiste de la Révolution française n’a rien d’un catéchisme, elle est au contraire riche de sa diversité et d’une histoire dont elle ne saurait être isolée. (lire la suite)
(1) Publiée d’abord sous forme de fascicules entre 1901 et 1904. Dernière édition sous la direction d’Albert Soboul aux Editions Sociales, 1968.
L'intégralité des entretiens sera accessible en ligne à partir du mois d'avril 2011 sur le site de Revues.org
Signalons également l'article de Julien Louvrier, « Marx, le marxisme et les historiens de la Révolution francaise au XXe siècle », accessible à cette adresse
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